dimanche 5 juin 2022

Mystères


Mathilde est une vieille paysanne. Elle vit seule à la sortie du bourg dans une minuscule maison avec un p'tit bout de cour, juste assez grande pour avoir un clapier avec deux/trois lapins et une poule nommée Cocotte qui lui donne tous les matins, un œuf. Elle lui a installé un nid douillet, à l'abri de la pluie et du vent, dans un renfoncement. C'est presque à heure fixe qu'elle lance son cri, fière d'avoir encore pondu. Après avoir avalé son bol de café, Mathilde va le ramasser. Elle remercie Cocotte, lui donne sa ration de grain et remplit sa gamelle d'eau. C'est un rituel entre elles deux.


Or un matin, Mathilde a trouvé deux œufs. Ben ça alors ! Elle a regardé sa poule avec attention, elle ne semblait pas différente des autres matins. Les œufs dans son tablier, elle est rentrée, les a déposés sur la table, les a inspectés, les a soupesés. Ils se ressemblaient comme deux gouttes d'eau. C'était bien sa Cocotte qui les avait faits. Le lendemain matin, même chose. Encore ! Et le matin suivant.


Ce jour-là était jour de marché au village. Alors qu'elle attendait son tour devant l'étal du boucher, elle a entendu sa voisine, la grosse Dondon, celle à qui elle n'adresse plus la parole depuis ... ne sait plus très bien quand ... ne sait peut-être même plus pourquoi ... se plaindre que sa poule ne pondait plus. Ça fait bien trois jours ! Mathilde n'a pas bronché. Faudrait p't'être l'amener au coq ! ont dit les commères.


C'était donc l'explication.


Mathilde, pensant que c'était sa Cocotte qui avait pondu les deux œufs, les avait mangés. Depuis trois jours, elle mangeait l’œuf de la poule de la grosse Dondon ! Et s'ils étaient empoisonnés ! D'un seul coup, elle s'est sentie toute chose. La tête lui a tourné. L'estomac chamboulé, elle a senti ses forces lui manquer. Elle s'est allongée sur son lit. Plus elle y pensait, plus elle sentait le poison faire son effet. Elle allait mourir, c'était sûr.


Quand le serrurier à ouvert la porte, à la demande du maire, on a trouvé le corps de Mathilde étendu sur son lit. Morte de mort naturelle, de vieillesse a déclaré le médecin appelé pour constater le décès.


C'est une belle mort ! a dit sa voisine en ramassant les œufs.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Aïe ! a crié chaque branche coupée Tu étais trop haut  a dit le sécateur Mais mon ombre était utile les jours de grand soleil ! Elle reviend...